Le Projet de transition professionnelle est né avec la loi « Avenir Professionnel ». Ce dispositif, opérationnel depuis janvier 2019, est à la main des salariés qui souhaitent se reconvertir. Stéphane Maas, directeur de l’Association Transitions Pro Ile-de-France, donne les clés de réussite d’un PTP et de son financement.

Quelle est la logique du projet de transition professionnelle ?

Ce dispositif est ciblé sur la reconversion des salariés. Il prend le relais du CIF, le congé individuel de formation. Mais il porte d’autres ambitions. Le CIF était par exemple plus orienté sur la promotion sociale et servait plutôt des gens qualifiés. Avec le PTP, on vise un changement de métier. Le salarié peut envisager sa reconversion dans l’entreprise parce qu’il sent que de nouveaux métiers émergent et qu’il souhaite prendre les devants ou en dehors de l’entreprise parce qu’il souhaite changer de secteur d’activité par exemple. Une autre différence avec le CIF, c’est l’individualisation du parcours et de la formation du salarié. Auparavant le CIF finançait des formations longues sans prendre en compte les compétences détenues par la personne. Ici, il s’agit de faire du sur-mesure. Avant d’engager un PTP et de présenter sa demande de financement à une Association de Transitions Pro qui instruit le dossier, l’organisme de formation devra réaliser un positionnement préalable du salarié sur les blocs de compétences de la certification visée. Par exemple, si le référentiel de formation prévoit  100 h en anglais alors que la personne maîtrise bien cette langue, elle n’en fera peut-être que 50 h.

Comment un salarié peut-il mettre toutes les chances de son côté pour décrocher le financement de son projet ?

En le préparant minutieusement et en visant un métier porteur, c’est-à-dire dont les perspectives d’emploi sont réelles. Ce qu’il faut avoir en tête, c’est que lorsqu’elle examine le dossier d’un salarié, la commission paritaire interprofessionnelle (CPI) d’une Association de Transitions Pro va croiser deux grilles d’évaluation. La première est notée sur 300 points. Elle va examiner trois critères cumulatifs : la cohérence du projet de transition professionnelle destinée à permettre de changer de métier ou de profession, la pertinence du parcours de formation et des modalités de financement envisagées à l’issue de l’action de positionnement préalable, les perspectives d’emploi à l’issue de l’action de formation, notamment dans la région. Cette étape évalue en quelque sorte la préparation du projet par le candidat. La deuxième grille est celle des priorités de financement des PTP définies par France Compétences (l’organisme qui régule l’écosystème de la formation -ndlr). Ces 10 priorités sont notées sur 20 points. Par exemple, si je choisis de me reconvertir sur un métier à forte perspective d’emploi, dit « porteur », au niveau de la région Île-de-France, j’obtiendrai 3 points sur 20. Idem si la personne vient d’un secteur en déclin sur la Région. Si le salarié a un bas niveau de qualification, son dossier obtiendra 5 points, s’il est salarié d’une entreprise de moins de 50 salariés, il décrochera 1 point etc… 5 priorités ont un caractère national, les 5 autres ont une dimension régionale.

Comment peut-on se faire aider dans cette préparation ?

Le salarié peut s’appuyer sur le Conseil en évolution professionnelle, le CEP. C’est un service gratuit que l’on trouve dans toutes les régions. Le conseiller emploi l’aidera à mieux connaître le métier visé et ses contraintes, à savoir s’il s’agit d’un métier en émergence ou avec de fortes perspectives d’emploi. Des listes de métiers existent au niveau de chaque Région. Il pourra aussi l’aider à identifier les organismes de formation qui lui permettront de réaliser un positionnement préalable et de présenter un parcours de formation individualisé à la commission paritaire interprofessionnelle. La loi n’oblige pas le salarié à préparer son PTP avec un CEP. Mais s’il le fait, en Ile de France nous valorisons cette démarche en accordant 1 point au dossier. Par ailleurs, nous préparons une application qui permettra aux candidats d’évaluer le nombre de points que son projet pourrait recueillir. Il saura s’il a des chances de décrocher son financement ou s’il doit encore travailler son dossier. Le succès d’un projet de transition professionnelle réside dans sa préparation. Et il faut bien compter six mois pour le faire sérieusement.

Les salariés se sont-ils emparés de ce dispositif ?

En 2020, Nous avons reçu en île de France 9500 dossiers. 5000 ont été financés. Au niveau national, ce sont environ 30 000 dossiers déposés pour près de 18 000  financés. Nous prévoyons une montée en puissance pour 2021, car si l’on analyse les données de la dernière enquête du Centre Inffo, 47% des actifs préparent ou envisagent de préparer une reconversion. Un actif sur 5 serait déjà dans la phase de préparation. Nous voyons deux types de profils à travers les dossiers que nous examinons : les profils de reconversion subie. Ce sont des salariés qui anticipent la destruction de leur emploi. Et les profils de reconversion choisie, pour l’instant encore les plus nombreux, souvent en lien avec un nouveau projet de vie.

Tous les projets sont-ils finançables ?

Non, les formations financées doivent être certifiantes. Par ailleurs, cela dépend de la qualité du dossier et de priorités, mais aussi de nos moyens. En 2021, le taux d’acception des dossiers devrait être supérieur à 60% en Ile de France. En 2020, il était de 55%. Dans le cadre du plan de relance, 100 millions d’euros supplémentaires ont été fléchés sur le PTP ce qui porte notre enveloppe à près de  550 millions d’euros pour cette année. Pour faire plus encore, nous avons deux leviers. Celui des co-financements que nous allons chercher auprès d’organismes ou d’institutions comme les Régions, le FSE, le FNE, les Opco dans le cadre des contributions conventionnelles. Le deuxième levier tient à l’optimisation des parcours qui pourraient être plus innovants en intégrant par exemple des modalités pédagogiques comme l’Afest, la formation à distance, le blended-learning. En Ile de France, nous disposons d’un observatoire des coûts des formations, afin d’alerter si nécessaire les salariés qui déposent un dossier de financement, de devis qui nous paraissent ne pas être conformes aux prix franciliens.

Anne-Cécile Geoffroy

Cet article a été publié initialement le 8 mars 2021 sur le site Trouver une formation CSE

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